Virginie occupait depuis 3 ans un poste d’assistante de direction, gérant le planning et le secrétariat du directeur général et du directeur adjoint d’un grand groupe de publicité. Appréciée pour son travail, elle était très investie et ne comptait pas ses heures.
Un changement de poste pour son 1er enfant
A la naissance de son premier enfant et au terme de trois mois de congé maternité, elle demande à changer de poste, ne pouvant plus imaginer de travailler sous une telle pression et avec des « horaires élastiques ». Elle intègre alors un poste de coordinatrice au service trafic. Dix jours d’adaptation lui sont nécessaires pour apprendre le métier : « J’avais l’impression d’avoir perdu mon cerveau ! Puis je me suis habituée à mon nouveau rythme. Mon nouveau travail m’intéressait beaucoup. Il consistait à suivre les campagnes d’un bout à l’autre de la chaine de fabrication, de gérer la coordination entre les commerciaux, les créatifs, la direction et la production ».
Une réorganisation du service dont elle va payer les pots cassés…
Moins d’un an plus tard, Virginie demande pourtant à réduire son temps de travail à un 4/5 ème, ne parvenant plus à faire face à ses difficultés d’organisation de jeune maman et « tout simplement pour mieux profiter de sa fille ». Elle travaille ainsi pendant un an avant de tomber enceinte de nouveau. Entre-temps le service avait été réaménagé : « il nous été demandé de faire d’avantage de gestion, tâche habituellement réservée à la comptabilité . Chaque coordinatrice était chargée de gérer les budgets de ses clients. Certaines coordinatrices plus expérimentées ont commencé à se plaindre de cette nouvelle répartition et du coup il m’est incombé de faire la gestion de plusieurs coordinatrices ».
Une perte de motivation
« J’avais moins de temps à consacrer au suivi de production, qui était la partie la plus intéressante de mon travail. Ce n’était pas ni dans mes compétences, ni à ma demande, mais étant moins présente et enceinte, j’étais la personne désignée pour faire les basses tâches ». Son poste est devenu beaucoup moins intéressant et son niveau de motivation a baissé tout autant. Elle s’est sentie dévalorisée par rapport aux autres coordinatrices et sa chef de service gestion/trafic était continuellement sur son dos pour contrôler son travail. « Je n’avais pas les arguments pour me battre contre cette situation du fait de mon 4/5ème et de ma grossesse. Je me sentais en position de faiblesse et pas en mesure de défendre mon poste ».
Un retour impossible
Après la naissance de mon fils, elle n’avait aucune envie de revenir faire de la gestion. Elle a alors posé un congé parental d’un an. Avant le délai écoulé, son employeur lui demande quelles sont ses intentions. « Je lui ai annoncé que je ne souhaitais pas revenir à mon poste tel qu’il était devenu. Aucune proposition n’ayant été faite par ma chef de service pour rééquilibrer les tâches, j’ai décidé de donner ma démission ». Elle a appris ensuite par d’anciennes collègues de travail qu’après son départ, l’organisation du service avait de nouveau changé et que la gestion était finalement repartie vers la comptabilité, personne n’ayant accepté de reprendre les tâches qui lui étaient échues.
Un sentiment de gâchis
« Je ne cache pas que j’étais ravie de pouvoir me consacrer à mes enfants à plein temps n’ayant connu avec mon premier que les journées de course folle, dépose à la crèche tôt le matin, travail, retour dans l’urgence, courses, etc. et toute la fatigue qui va de pair. La vie de famille est difficilement compatible avec un vrai investissement professionnel. Pourtant, j’aimais mon travail et si je n’avais pas eu le sentiment d’être mise sur la touche et dépréciée dans l’équipe, j’aurais tout fait pour revenir en poste ».
Pourquoi ne pas s’être battue pour récupérer les fonctions initialement prévues dans son poste ?
Si Virginie s’était tournée vers les délégués du personnel de son entreprise, elle aurait trouvé le soutien nécessaire pour faire valoir ses droits. Mais elle n’a pas osé. « Je me suis sentie – et on m’a fait sentir – coupable de ma baisse de disponibilité, de ma demande de réduction de temps de travail alors que ma motivation, elle, n’avait pas changé ni la qualité de mon travail. Comme si le fait de devenir mère et d’avoir une vie de famille faisait de moi quelqu’un de moins fiable. C’est vrai que lorsqu’on est célibataire, on ne compte pas ses heures, on s’investit à 200%. Mais un changement de vie et de priorités ne signifie pas un désinvestissement vis à vis de son travail. Je ne voulais pas entrer en conflit avec ma direction et revendiquer mes droits. J’ai préféré laisser ma place et même si je ne le regrette pas, je continue de garder un sentiment d’injustice ».
Ce récit témoigne d’une situation assez courante et de nombreuses jeunes mères vivent cette expérience. C’est pour changer cette tendance qu’à l’initiative des partenaires sociaux, des actions vont être entreprises dans de grands groupes comme Cap Gémini.